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COLLOQUES


UNE DISSIDENCE INTÉRIEURE ? LA LITTÉRATURE SOVIÉTIQUE EN RÉSISTANCE
Normes, mensonges et miracles, dans la littérature russe soviétique

Cécile Vaissié, Université Rennes 2


Professeur en études russes et soviétiques.



Dans les années 70, Grigori Svirski, un émigré soviétique, rédige un livre, Écrivains de la liberté, dans lequel il évoque les gens de lettres qui ont su maintenir leur « liberté intérieure » dans la littérature soviétique d’après-guerre 1. L’introduction à l’édition française de cet ouvrage est rédigée par Efim Etkind, universitaire et, lui aussi, émigré soviétique. Pour ce dernier, Grigori Svirski démontre qu’une « littérature véritable » a toujours existé en URSS, ce que nierait Alexandre Soljénitsyne. Etkind justifie cette interprétation en reprenant une citation de Soljénitsyne, donnée par Svirski dans son livre, mais il la tronque : « (…) Dans les années 30, 40 et 50, nous n’avions pas de littérature. Car sans toute la vérité, il n’y a point de littérature. » Etkind y voit un « maximalisme » qui serait « impressionnant, mais injuste 2 ». Mais lui-même est ici caricatural.
Cette citation se trouve, en effet, à la fin de la quatrième partie de L’Archipel du Goulag, alors que l’écrivain vient de révéler l’existence, l’ampleur et le fonctionnement du système concentrationnaire soviétique et de dénoncer les « poisons » qui, secrétés par cet Archipel, ont « intoxiqué » le pays tout entier. Soljénitsyne lance un défi à ses contemporains et à lui-même, et il apporte une réponse qui le concerne au premier plan :

« Saurons-nous, oserons-nous décrire toute l’ignominie dans laquelle nous avons vécu (…) ? Mais dès lors que nous ne dévoilons pas cette ignominie avec force, nous donnons dans le mensonge. C’est pourquoi, à mon avis, nous n’avons pas eu de littérature dans les années 30, 40 et 50. Car il n’y a pas de littérature sans vérité totale. Aujourd’hui, on ne nous montre cette ignominie que dans la mesure où le permet la mode, par un sous-entendu, une incise, un ajout, une nuance, et l’on retombe dans le mensonge 3. »

Le « mensonge » dénoncé est donc, très concrètement, celui qui consiste à taire ou à dissimuler les répressions et, si l’écrivain parle de « vérité totale », c’est parce qu’il sait que celle-ci n’existe alors que par bribes. De son côté, Grigori Svirski confirme que les années 40 étaient une « époque de falsifications sanglantes 4 ».
Les deux hommes portent, en fait, des jugements très similaires sur la littérature stalinienne, et les désaccords qui existent entre eux ne viennent pas de cette question. La polémique, soulignée par Etkind, est largement factice, mais elle n’est pourtant pas anecdotique. En effet, elle contribue à relativiser le désastre traversé par cette littérature et, surtout, le rôle déterminant, joué par l’œuvre de Soljénitsyne au début des années 60. Les auteurs « libéraux » - dont Svirski faisait partie – ont, en effet, immédiatement compris que la publication d’Une Journée d’Ivan Dénissovitch marquait une rupture fondamentale : c’était un « miracle littéraire », a ainsi proclamé Korneï Tchoukovski. Or, pour prendre la mesure, à la fois de ce désastre et de cette rupture, il convient de réfléchir aux spécificités de la littérature soviétique et à son évolution, ainsi qu’au rôle qu’y jouent les normes, les mensonges et les miracles.

Une littérature transformée en propagande : de nouvelles normes

En Russie, à partir de la révolution d’Octobre, la littérature est redéfinie par le politique, et des fonctions spécifiques lui sont attribuées. En novembre 1905, Lénine a, en effet, publié un article, « L’organisation du Parti et la littérature du Parti », dans lequel il affirme que la littérature « ne saurait être une affaire individuelle, indépendante de la cause générale du prolétariat », mais doit devenir une « partie intégrante du travail organisé, méthodique et unifié du Parti social-démocrate ». Il faut, estime Lénine, mettre fin à un « vieux principe russe » : « L’écrivain écrit quand ça lui chante, et le lecteur lit s’il lui chante 5 ». Or, cet article qui, en Occident, a fait l’objet d’interprétations très diverses et souvent politiques, sera constamment cité par les autorités soviétiques pour justifier la totale soumission de la littérature aux objectifs du Parti.
Cette instrumentalisation se met en place dès l’arrivée des bolcheviks au pouvoir, et les années 20 sont consacrées à faire entrer, de gré ou de force, la littérature russe dans la norme imposée par le Parti. Il faut éliminer les auteurs incapables de s’adapter, rééduquer ceux qui peuvent l’être et en sélectionner de nouveaux qui, issus de la classe ouvrière ou de la paysannerie, constitueront, une fois formés par le Parti, la nouvelle intelligentsia aux ordres. À la fin des années 20, la situation se durcit encore et, le 23 avril 1932, une résolution du Bureau politique du Comité central annonce la disparition des organisations littéraires existantes. Tous les écrivains soutenant la politique du Parti seront désormais membres d’une unique « union unie d’écrivains soviétiques, comprenant une fraction communiste 6 ». Le cas des autres n’est pas prévu : aucune divergence n’est admise, ni même envisagée. L’Union des écrivains soviétiques est officiellement créée, et son Congrès fondateur qui débute le 17 août 1934 précise encore la définition de la littérature. Le projet soviétique s’articule, en effet, autour d’un double but : construire le communisme et créer un homme nouveau, la création de celui-ci étant, à la fois, l’un des buts à atteindre et la condition nécessaire pour bâtir le communisme. Or, conformément au souhait de Lénine, la littérature devient un outil, chargé d’assurer la réussite du projet global.
Lors de ce Congrès de 1934, Andreï Jdanov, responsable de l’idéologie au Comité central, rappelle ainsi que les écrivains ont pour tâche « de remodeler et d’éduquer idéologiquement les travailleurs dans l’esprit du socialisme ». La littérature soviétique ne peut donc pas être apolitique, puisqu’elle « sert » la « cause » de la « construction socialiste 7 ». Le Parti lui dira – et le discours de Jdanov en donne un premier aperçu – sur quoi et comment écrire, et, très logiquement, il la jugera en fonction, non de critères littéraires, mais de son efficacité à remodeler les consciences. C’est pourquoi, à partir de 1934, les œuvres des écrivains officiels sont de la propagande qui ne rappelle que par moments la littérature, exactement comme les publi-reportages, dans la presse occidentale, n’ont qu’un vague rapport avec le journalisme. L’écrivain Milan Kundera considère ainsi que les romans soviétiques sont des « romans après l’histoire du roman », parce qu’ils doivent désormais illustrer les vérités proclamées par le Parti, et non explorer des doutes 8. La même chose peut être dite pour tous les genres littéraires : ce qui est mort en URSS en 1934, voire avant, ce n’est pas tant « l’histoire du roman » que la littérature, telle qu’elle était conçue dans la Russie du XIXe siècle et le reste en Occident. Une nouvelle norme littéraire a été définie, à laquelle tous les écrivains sont censés se conformer.
Et, pour imposer cette norme, les autorités, politiques et littéraires, ont recours au fouet et à la carotte - au « knout » et aux « pains d’épice » pour reprendre l’expression russe. Elles pourchassent sans relâche ceux qui ne se plient pas aux nouvelles exigences, alors que, surtout à partir de 1934, elles distribuent des appartements, des datchas, des bons de vacances et des aides financières aux auteurs qui s’adaptent. Terrorisés, appâtés et parfois séduits par le projet soviétique, des écrivains jouent le jeu.
Or, cette nouvelle norme littéraire implique une transformation du concept de « vérité », un concept qui – pour aussi délicat qu’il paraisse en Occident – est au cœur de la culture russe pré-révolutionnaire. L’imposition du réalisme socialiste comme style unique dans les arts soviétiques témoigne de cette rupture. Désormais, la littérature se prétend « réaliste », mais décrit la réalité, non pas telle que celle-ci est, mais telle qu’elle pourrait exister, telle qu’elle existera sûrement un jour, quand le communisme régnera… Le mensonge triomphe donc, tandis que les notions mêmes d’auteur et d’œuvre sont censées disparaître. Les ouvrages collectifs sont ainsi encouragés, surtout au début des années 30. Et si, par la suite, ils se font moins nombreux, toute publication soviétique demeure l’objet de multiples réécritures, auxquelles participent de nombreux intervenants. Des pages sont ajoutées et d’autres gommées, pour plier l’œuvre à la norme idéologique du moment 9.
Certes, même pendant les années staliniennes, des auteurs ne souhaitent pas, ou ne peuvent pas, se conformer aux nouvelles règles du jeu. Anna Akhmatova, Andreï Platonov, Boris Pasternak, Mikhaïl Boulgakov, d’autres encore, continuent, en effet, de concevoir la littérature comme elle l’était, en Russie, avant la révolution, et ils sont donc persécutés.

Des normes, à la fois rigides et floues

La résistance de ces auteurs à la norme imposée n’est pas toujours délibérée. En effet, cette norme est à la fois rigide et mouvante, et elle ne définit pas clairement ce qui est permis ou pas. Cela la rend plus inquiétante encore, pour les auteurs, mais aussi les critiques ou les éditeurs, qui peuvent être accusés de refuser les cadres de la littérature soviétique, sans avoir rien souhaité de tel. Ces ambiguïtés apparaissent clairement dans deux épisodes douloureux qui impliquent Alexandre Fadéïev et Andreï Platonov. Le premier est l’incarnation de la littérature soviétique officielle ; le second ne rejette pas celle-ci à priori, mais ne s’y intègre pas, et les deux cernent mal la nouvelle norme.
En septembre 1929, la revue officielle Oktiabr’ publie un récit d’Andreï Platonov, Makar qui doute (Ousomnivchiïsia Makar), dans lequel le héros, un paysan russe, doute – a-t-on idée ! – de l’authenticité de l’État prolétarien. Ce récit suscite la colère de Staline. Or, Alexandre Fadéïev est alors le rédacteur en chef d’Oktiabr’. Âgé de vingt-huit ans, il est membre du Parti et, depuis 1926, l’un des dirigeants de l’Association des écrivains prolétariens. S’il a publié ce Makar qui doute, c’est parce qu’il n’y a pas repéré de divergences avec la norme imposée : même lui ne maîtrise pas toutes les règles de cette littérature qui se met en place. Il se repent d’ailleurs de cette faiblesse, et, fin décembre, avoue à l’un de ses mentors avoir « laissé passer récemment un récit idéologiquement ambigu » et « reçu de Staline une volée de bois vert méritée : le récit est anarchiste 10 ». 
Mais, parce que les nouvelles règles restent floues, Fadéïev refait d’autres erreurs. En 1931, il publie, dans la revue Krasnaïa Nov’, un nouveau récit de Platonov, En réserve (Vprok). Le jeune dirigeant aurait souligné les passages qui devaient être coupés, dans cette nouvelle, pour des considérations politiques. Mais le typographe n’aurait pas compris et aurait… mis ces passages en gras. Fadéïev n’aurait pas vu les épreuves, si bien que le texte est passé 11. Faut-il croire à cette version absurde ? Toujours est-il que Staline réagit violemment : pour le Guide, ce « récit de l’agent de nos ennemis » a « été écrit pour ternir le mouvement des kolkhozes et été publié, par des communistes à la tête creuse, pour   démontrer leur aveuglement inégalé 12 ». L’ambitieux Fadéïev n’aurait pourtant jamais publié ce récit, s’il avait considéré Platonov comme un « agent de l’ennemi » et En réserve comme une mise en cause de la politique agricole soviétique. La norme que le politique impose alors à la littérature demeure obscure, et c’est d’ailleurs pourquoi, le 8 juin 1931, Platonov écrit à Staline et s’excuse des erreurs idéologiques commises 13. Lui aussi tente de s’adapter. En vain.
Même les purges qui se déchaînent dans les années 30 ne correspondent pas à une logique, facilement décryptable. Qui peut prétendre comprendre pourquoi Mandelstam est envoyé au Goulag, et pas Pasternak ? Pilniak est arrêté et, sous la torture, il met en cause son ami Fédine : tous deux auraient souvent parlé du « régime insupportable instauré par le Parti 14 ». Mais Pilniak est exécuté, alors que le NKVD ne touche pas un cheveu de Fédine.

La Seconde Guerre mondiale n’est pas encore terminée que certains auteurs rappellent au pouvoir l’ambiguïté des règles littéraires. En effet, ils estiment avoir démontré, au cours de ce conflit terrible, leur pleine loyauté à l’État, et pouvoir donc demander que les règles soient clarifiées. Le 22 février 1945, Anatoli Tarassenkov, adjoint du rédacteur en chef de Znamia, souligne ainsi, dans une lettre au Comité central, que sa revue est « contrôlée par un nombre incalculable d’instances » et que l’une interdit une œuvre que l’autre vient d’autoriser. Des textes autorisés sont, peu après, interdits, si bien qu’il faut les découper dans les exemplaires imprimés 15 Mais rien n’y fait, et les ambiguïtés de la norme ne se résorbent pas. Elles apparaissent, une fois de plus, lors du scandale qui se déclenche autour de La Jeune Garde, le roman le plus célèbre d’Alexandre Fadéïev. En 1943, le Comité central du Komsomol a demandé au dirigeant littéraire d’écrire un livre sur l’histoire vraie de jeunes résistants soviétiques, exécutés par les nazis. Pour son travail, Fadéïev bénéficie de l’aide logistique des autorités qui lui fournissent des documents et des témoignages 16. En juin 1946, son roman est couronné par un prix Staline. Pourtant, dès novembre 1947, le département idéologique du Comité central reproche à La Jeune Garde de ne pas assez montrer, ni le rôle du Parti, ni l’action libératrice de l’Armée rouge 17 ! Fadéïev doit donc réécrire son roman, et la deuxième version, publiée en décembre 1951, est très différente de la première 18. Or, cette deuxième version est approuvée par un article de la Pravda, dans lequel l’enjeu réel des critiques apparaît clairement : il s’agit de faire admettre que le jugement suprême sur une œuvre appartient au Parti et peut varier en fonction des circonstances. D’ailleurs, à cette époque, nombreux sont les auteurs qui doivent réécrire leurs œuvres déjà publiées. De quelle « vérité » pourrait-il être question, pour reprendre le terme choisi par Soljénitsyne !

Mensonges, silences et personnalités multiples

Parallèlement, toute « pensée autre » est strictement réprimée, et pas seulement dans la littérature. Dans ces tragiques années staliniennes, les écrits les plus privés peuvent être violés et servir de base à des condamnations. Soljénitsyne est ainsi expédié dans un camp pour des propos exprimés dans une lettre à un ami. Dès lors, les Soviétiques redoutent de tenir des journaux intimes et ceux qui s’y risquent multiplient les précautions. Pendant la guerre, Olga Bergholz rédige ainsi deux journaux intimes : un « officiel » qui sera rapidement publié, et un autre, en partie publié en 1991, qui était enfermé dans une boîte en fer et enterré dans une grange... Dans celui-ci, la poétesse évoque « les années de mensonge effrayant, les années où tous ceux qui pensaient, qui étaient fidèles à la théorie et qui voyaient que, dans la pratique politique, c’était tout le contraire, étaient divisés en deux de la façon la plus torturante » :

« Ils se taisaient et souffraient le martyre, et ils votaient pour l’exclusion de gens, dont l’innocence était évidente pour eux. Et ils mentaient, mentaient, sans liberté, de façon effrayante, et ils se craignaient les uns les autres, et ne se ménageaient pas, et essayaient de croire, de façon sauvage, désespérée 19. »

Les écrivains soviétiques doivent, en effet, dissocier leurs discours publics de leurs convictions. Dans un rapport de 1931, la police politique relève déjà que, extérieurement, « l’intelligentsia antisoviétique » donne le change, mais qu’en son sein, beaucoup avertissent secrètement les jeunes : « Mes prises de position idéologiques, c’est de la prostitution. Il faut travailler, travailler. Il faut écrire et garder cela dans son sac. Il ne faut pas oublier que la situation sera différente demain. Il faut penser à demain 20. » Mais la pression se fait de plus en plus forte, et impose d’impressionnants dédoublements de personnalité, semblables à celui que Pasternak relève, en février 1942, chez Alexandre Fadéïev : « Personnellement, Fadéïev m’aime bien, mais, si on lui ordonne de m’écarteler, il le fera en toute conscience et en rendra compte avec vigueur, même si ensuite, quand il se remettra à boire, il dira qu’il a pitié de moi et que j’étais quelqu’un de très bien. » Le poète en a conscience :

« Il y a cette expression, « un homme à l’âme double ». Elle s’applique à beaucoup de personnes ici. Mais au sujet de Fadéïev, je dirais autre chose. Son âme est divisée en une multitude de compartiments étanches, comme un sous-marin. Seul l’alcool brouille tout et lève les parois 21… » 

Cette rupture entre comportement public et pratiques privées se retrouve dans les goûts littéraires d’Alexandre Fadéïev. En public, celui-ci célèbre les œuvres couronnées par des prix Staline. En privé, il critique ces auteurs officiels et récite par cœur les vers de poètes pourchassés 22 !
D’autres que lui sont célèbres, dans le milieu littéraire russe, pour leurs dichotomies. Anatoli Tarassenkov occupe des fonctions de direction dans des revues importantes, mais les œuvres interdites de poètes, censurés et persécutés, trônent dans sa bibliothèque. Il peut « lire Pasternak pendant des heures, avec des larmes de joie », mais cela ne l’empêche pas d’attaquer celui-ci, en 1949, ni d’émettre régulièrement des jugements publics, absolument opposés à ceux qu’il exprime chez lui 23. De même, la romancière Véra Panova clame son amour et son admiration pour Pasternak, et les murs de son bureau sont, pour moitié, couverts de photographies du poète. Vers le milieu des années 50, elle explique à Vassili Grossman : « Pasternak est mon poète préféré, celui qui m’est le plus cher parmi les poètes russes contemporains. Il est mon idole 24. » Mais, en octobre 1958, lorsque cette « idole » reçoit le prix Nobel de littérature, l’Union des écrivains organise trois réunions, au cours desquelles les gens de lettres doivent condamner le poète et l’exclure de leurs rangs. Véra Panova assiste à celle du 27 octobre et fait partie des vingt-neuf auteurs qui montent à la tribune pour stigmatiser la « félonie de Pasternak ». Elle assure discerner, dans ses textes, la manifestation d’une « âme pleine d’aigreur » qui n’aurait « aucun sens de sa terre natale, aucun sens de la camaraderie, rien qu’un égoïsme démesuré, (…), rien qu’un orgueil intolérable 25 ». Véra Panova est venue spécialement de Leningrad à Moscou pour participer à cette réunion, alors que – relève un Grossman indigné - certains écrivains moscovites ont prétendu être malades et sont restés chez eux 26.
Des années plus tard, la journaliste Raïssa Orlova tentera d’expliquer le comportement de Panova qu’elle a bien connue. En 1979, Orlova prend, en effet, conscience du parcours que les cercles intellectuels russes ont parcouru, presque sans s'en rendre compte, depuis les années 60. Elle se souvient qu’en 1960, elle travaillait pour la revue Inostrannaia Literatoura (Littérature Etrangère), où devait paraître le roman de Salinger, L’Attrape-cœur. Elle a demandé à Véra Panova d’écrire une postface à ce texte. Peu après, le rédacteur en chef adjoint a exigé que cette postface critique les défauts du héros et condamne Salinger pour sa « décadence ». Raïssa Orlova a été ainsi confrontée à un dilemme, courant dans les cercles intellectuels soviétiques : elle n'était pas d'accord avec ces indications, mais le principal n'était-il pas que le roman sorte ? Elle a donc décidé de transmettre ces instructions à Véra Panova qui, à sa grande surprise, a accepté sans discuter de modifier son texte.
Près de vingt ans plus tard, Raïssa Orlova explique que le premier mari de Véra Panova avait été tué pendant la terreur des années 30 et que la jeune veuve avait élevé avec peine ses trois enfants. Par la suite, celle-ci est devenue « un écrivain célèbre, lauréate du Prix Staline, c'est-à-dire une personne relativement protégée de la colère du seigneur ». Toutefois, la peur la « tenait » : « une peur profondément enfouie, inguérissable ». Et c’est pourquoi Véra Panova a pris part, en 1958, aux persécutions déchaînées contre son « poète préféré ». Sans doute ne croyait-elle, précise Raïssa Orlova, ni « à ce qu'elle disait de Pasternak », ni « à ces réserves qu'elle avait laissé mettre dans son article sur Salinger », mais « le petit compromis à la rédaction de la revue et la participation à la persécution du grand poète étaient des phénomènes du même ordre 27 ». Le dressage était impeccable et les pires mensonges se justifiaient. Or, des mensonges similaires imprègnent aussi les œuvres de l’époque.

Des œuvres intrinsèquement mensongères

Entre 1949 et 1957, Lidia Tchoukovskaïa écrit le roman La Plongée, dont l’action se passe en 1949. Alors que l’hystérie antisémite des dernières années staliniennes se déchaîne contre les « cosmopolites », l’héroïne et narratrice, une femme de lettres qui ressemble beaucoup à l’auteur, va se reposer dans une maison pour gens de lettres. Elle est hantée par la disparition de son mari, arrêté en 1937. On lui a dit qu’il était condamné à « dix ans sans droit de correspondance », mais elle se doute qu’il est mort. En revanche, elle ignore tout de ce qui a pu suivre son arrestation. Dans cette villégiature, elle rencontre un écrivain, Bilibine. Celui-ci a écrit un roman que la revue Znamia a presque accepté, sous réserve que des modifications y soient apportées. Or, Bilibine avoue à la narratrice avoir été détenu dans un camp, et il lui raconte comment la vie s’y déroulait, si bien qu’elle peut imaginer le sort qui a peut-être été celui de son mari. Elle fait aussi la connaissance d’un journaliste très sympathique, qui doit retourner à Moscou plus tôt que prévu. Peu après, la narratrice lit, dans la presse, un discours – une « horreur » ! - que cet homme a prononcé contre les critiques « cosmopolites », et elle est atterrée :

« On déjeune chaque jour avec quelqu’un, quelqu’un comme les autres, et brusquement voilà qu’il se met à chanter les mêmes airs que des vauriens… Alors que lui-même m’avait dit, il y a trois jours, que ces critiques étaient de merveilleux connaisseurs du théâtre 28. »

L’héroïne rencontre également Weksler, poète juif et ancien combattant, qui, une nuit, est arrêté et disparaît sans laisser de traces. Elle finit par lire le manuscrit auquel travaille Bilibine Ce dernier s’est inspiré de son expérience du camp, une expérience qu’il lui a racontée, mais il l’a transformée : les personnages de son texte ne sont plus des détenus, mais des mineurs, ce qui indigne la narratrice :

« Pourquoi n’avez-vous pas eu assez de dignité pour vous taire. Simplement pour vous taire ? Personne n’exigeait rien d’autre de vous… Ce n’est pas possible… par respect pour ceux… que vous avez enterrés… vous ne pouviez pas gagner autrement votre vie 29  ? »

Par la suite, elle s’en veut d’avoir été si dure :

« Je n’avais pas le droit de vous juger. Des chiens ne se sont jamais jetés sur nous. Je n’ai jamais vu la plaque de bois accrochée au pied d’un mort… Pardonnez-moi ! Vous ne souhaitez pas retourner là-bas, à la coupe du bois, dans la mine. Une deuxième fois ! Votre récit, c’est votre bouclier impuissant, votre protection inefficace… Pardonnez-moi ! Vous avez déjà fait un infarctus, la maladie coûte cher, vous avez besoin d’argent. Et comment vous, handicapé, pourriez-vous gagner votre vie ? Seulement en écrivant un mensonge plein de clichés… Excusez-moi ! Je n’avais pas le droit d’exiger de vous la vérité, moi je suis en bonne santé, mais je me tais. On ne m’a pas battu, de nuit, dans le bureau d’un enquêteur. Et quand on vous a battu, je me taisais. Quel droit ai-je de vous juger maintenant ? Pardonnez ma maudite cruauté, pardonnez-moi 30. »

Ce roman de Lidia Tchoukovskaïa décrit donc comment et pourquoi les écrivains et les journalistes ont été amenés, sous Staline, à mentir autant qu’ils le pouvaient, dans leurs discours et dans leurs œuvres. La femme de lettres – qui sera, par la suite, une proche de Soljénitsyne – n’a pas eu à chercher très loin ses exemples. Son journaliste ressemble à Constantin Simonov, et le roman de Bilibine à celui de Vassili Ajaïev, Loin de Moscou. Publié dans Novy Mir entre juillet et septembre 1948, ce texte, un chant de gloire à Staline, raconte comment un pipe-line est construit en Extrême-Orient pendant la guerre. Les ouvriers et Komsomols rivalisent de bonne volonté et de courage, heureux de travailler sur un chantier de choc, dans un pays libre. Mais le chercheur Thomas Lahusen a montré qu’en réalité, ce pipeline avait été construit par des prisonniers du Goulag, comme rien, dans Loin de Moscou, ne l’indique plus. L’auteur Vassili Ajaïev était lui-même un ancien détenu, arrêté pour activité contre-révolutionnaire en 1934, et il a accepté de remanier entièrement son manuscrit, pour transformer le récit de travaux forcés en un succès de la compétition socialiste 31… Or, la même pression qui engendre ces manipulations réduit aussi les écrivains au silence. Littéralement : à la fin des années 40, un rapport à Andreï Jdanov relève que des dramaturges préfèrent ne pas proposer de nouvelles pièces, par peur des réactions 32. La vie culturelle est gelée.

Le « miracle littéraire »

Alors, oui, Soljénitsyne a raison de dénoncer le mensonge qui imprègne la littérature des années 30, 40 et 50. Ce problème est criant, et c’est pourquoi le premier texte à témoigner du changement qu’engendre la mort de Staline s’intitule « De la sincérité dans la littérature ». L’enjeu est là, comme tous les contemporains le comprennent. Bien sûr, tous les écrivains n’ont pas plié de la même façon sous les exigences du pouvoir, mais la plupart l’ont fait à cette époque, tout simplement parce qu’ils n’avaient pas le choix : Mikhaïl Boulgakov a écrit une pièce sur Staline ; Anna Akhmatova a rédigé des poèmes chantant les louange du Guide, parce que son fils, Lev, avait été de nouveau arrêté… Toutes les œuvres soviétiques de cette époque ne sont pas non plus aussi imprégnées de mensonge que l’est Loin de Moscou. Mais les auteurs et les œuvres qui poursuivent les traditions pré-révolutionnaires sont des exceptions, dans le contexte de la littérature stalinienne. Des miracles.
Et c’est pourquoi Korneï Tchoukovski, homme de lettres et témoin de la vie littéraire, parle de « miracle littéraire », lorsqu’il lit le manuscrit d’Une Journée d’Ivan Dénissovitch. Immédiatement, il comprend, en effet, qu’avec ce texte, Soljénitsyne renoue avec cette littérature russe du XIXe siècle, dans laquelle des géants – Tolstoï, Tchékhov, Dostoïevski… - dénonçaient le sort réservé aux détenus dans les bagnes sibériens et critiquaient le pouvoir, dans une langue riche, puissante et personnelle. Et, à la suite de Tchoukovski, ceux qui dévorent ce récit, publié en novembre 1962, perçoivent qu’il marque un tournant fondamental, essentiel, irréversible 33. L’écrivain Véniamine Kavérine l’exprime très clairement lors d’un débat qui se déroule le 16 novembre 1966. Témoin lui aussi des évolutions littéraires depuis plus de quarante ans, il assure qu’avec Soljénitsyne, « une nouvelle littérature est arrivée », tandis que « l’ancienne, celle qui rampait comme un serpent (…), n’existe plus » : « Qui se souvient aujourd’hui des livres, publiés à des millions d’exemplaires, des livres mensongers qui louaient Staline, directement ou indirectement ? » Pour Kavérine, cette « nouvelle littérature » jette un pont entre les années 60 et les années 20, ces années 20 que Soljénitsyne n’évoque pas parmi celles du mensonge généralisé. Et Kavérine n’oublie pas de rappeler que des auteurs « ont tenu le coup et se sont opposés au mensonge » : Platonov, Zochtchenko, Babel, Boulgakov, Zabolotski 34… Comme autant de miracles.
Svirski ne dit pas autre chose, lorsqu’il évoque, dans Les Écrivains de la liberté, « la mutation, provoquée dans la littérature et la conscience sociale de la Russie, par le fait Soljénitsyne 35 ». Etkind lui-même cite des propos tenus par Svirski, en janvier 1968, lors d’une rencontre d’écrivains moscovites :

« Nous sommes si accoutumés au mensonge, que parfois nous n’avons plus le souci de la moindre vraisemblance. Nous entraînons dans ce mensonge les écrivains eux-mêmes, qui se voient obligés de dire le contraire de la vérité, de mentir, selon une discipline supérieure, comme on dit 36… »

Ce jour-là, Svirski fait écho, presque au mot près, à ce que Soljénitsyne a déclaré, en 1967, dans sa lettre au quatrième Congrès de l’Union des écrivains soviétiques. Dans ce courrier, l’ancien détenu dénonce la censure, l’instrumentalisation de la littérature par le politique, ainsi que les persécutions lancées contre les gens de lettres. Il rappelle que, dès les années 20, des auteurs – il cite Pilniak, Platonov, Mandelstam – ont dénoncé les germes du culte de la personnalité, et qu’ils ont été liquidés ou étouffés. Il rappelle aussi ces écrivains qui ont été persécutés sans pouvoir se défendre : Boulgakov, Akhmatova, Tsvétaïeva, Pasternak, Zochtchenko, Platonov, Grine, Grossman 37… L’auteur d’Une Journée d’Ivan Dénissovitch s’inscrit ainsi dans une continuité - celle des « miracles » littéraires -, mais il marque aussi une rupture : il incarne la renaissance d’une norme littéraire différente. Or, même si celle-ci est repoussée dans la clandestinité et le samizdat, elle va désormais prendre une importance croissante, face à la norme officielle, encore dominante pendant plus de vingt ans 38.
Sur la littérature soviétique, Svirski est donc, pour l’essentiel, d’accord avec Soljénitsyne, même s’il accuse ce dernier de « (jeter) le bébé avec l’eau du bain 39 ». Il a d’ailleurs choisi de ne traiter, dans son livre, que de la « résistance littéraire (…) depuis la guerre », et il consacre les quatre cinquièmes de cet ouvrage aux œuvres publiées après la mort de Staline. Les divergences importantes qu’il a avec Soljénitsyne s’articulent, en fait, autour de la question juive et du « nationalisme » russe. Et Etkind ne l’ignore pas.

L’inadéquation de l’expression « dissidence intérieure »

Le tournant, pris au début des années 60, est donc net. Y a-t-il eu, ou non, littérature dans les années 30, 40, 50 ? Pourquoi pas ? Après tout, la mauvaise littérature ou la littérature propagande sont aussi de la littérature… En revanche, il n’y a pas de « dissidence intérieure », et l’association de ces deux mots est maladroite.
Le mot français « dissident » est la traduction la plus fréquente de deux mots russes distincts : « inakomysliachtchiï » et « dissident ». Le premier, d’origine slave, est traduit par le dictionnaire russe-français Chtcherba / Matoussevitch comme « hétérodoxe, non conformiste 40 ». Littéralement, il signifie « celui qui pense autrement » : il est conçu à partir du verbe « myslit’ » (penser) et du préfixe « inako » qui correspond au préfixe français « hétéro ». Par sa formation, il est l'opposé de « édinomychlennik » (« celui qui pense de la même façon »), nom relativement courant qui désigne, au contraire, ceux qu'unissent une même pensée, une même conception de la vie. Le mot d'origine latine « dissident » est absent du dictionnaire Chtcherba / Matoussevitch. Le dictionnaire russe-russe Ojégov précise, en revanche, qu'il s'agit d'une forme livresque et en donne deux définitions : « 1. Personne qui s'est détachée de la religion dominante, apostat. 2 Personne qui n'est pas d'accord avec l'idéologie dominante, « inakomysliachtchiï » 41. »  Cette définition suggère que les deux termes sont relativement synonymes, « dissident » étant plus livresque que « inakomysliachtchiï » et relevant, par ailleurs, de la sociologie religieuse. Ceci expliquerait qu'ils soient, dans plusieurs langues occidentales, traduits par un seul mot construit sur la racine du latin « dissidere ».
Si « dissident », sous ses deux formes russes, est pris comme un synonyme de « hétérodoxe, non conformiste », les écrivains qui n’acceptent pas la nouvelle finalité attribuée à la littérature soviétique, ou qui ne parviennent pas à plier leur œuvre à cette norme, peuvent effectivement être considérés comme des dissidents. Mais s’agit-il pour autant de « dissidence intérieure » ? Et que signifie cet adjectif « intérieur » ? La dissidence serait-elle à l’intérieur du pays ? Oui, certes, mais parlons alors de « dissidence russe et / ou soviétique ». Signifie-t-il que cette dissidence est cachée à l’intérieur de l’individu, et donc secrète ? Mais, si « dissidence » est une traduction de « inakomyslie », il est inutile de préciser « intérieure » : toute pensée est nécessairement intérieure, avant d’être, éventuellement, exprimée. Et il est impossible d’ajouter cet adjectif dès qu’il y a œuvre, puisque celle-ci est, par nature, destinée à être lue.
En outre, l’usage permet de saisir que « inakomysliachtchiï » et « dissident » traduisent des réalités différentes : si tout « dissident » est un « inakomysliachtchiï », tout « inakomysliachtchiï » n'est pas nécessairement « dissident ». Ce serait même pour pallier les imprécisions de « inakomysliachtchiï » que le mot « dissident » est né 42. Il a vu le jour dans les années 70 pour décrire ce phénomène qui est apparu dans les années 60, après le « choc Soljénitsyne » : des « inakomysliachtchie » protestaient, signaient des pétitions et faisaient circuler des textes samizdat, de plus en plus nombreux. Dès lors, accoler « intérieure » à « dissidence » (dissidentsvo) revient à nier la spécificité de celle-ci. Et il est maladroit de parler de « dissidence » (dissidentsvo) pour évoquer une littérature qui existait, des années avant l’apparition de ce terme. Cette confusion terminologique contribue, elle aussi, à relativiser le tournant littéraire, social et éthique, qui s’est produit en URSS au début des années 60.
D’ailleurs, Svirski ne parle pas de « dissidence intérieure », mais de « liberté intérieure » et de « littérature de la résistance morale » 43. Et la plupart des auteurs, qui pourraient légitimement être considérés comme « dissidents », réfutent ce terme. C’est le cas de Vladimir Voïnovitch qui assure en 1981 : « Je suis un écrivain, pas un dissident 44. » Car un écrivain n’est-il pas toujours un dissident, quelqu’un qui « pense différent » et qui l’exprime ?

Conclusion

Il n’y a donc pas de « dissidence intérieure » dans la littérature russe, ni dans les années 30, ni après. Il y a des individus qui ne veulent pas, ou ne peuvent pas, se plier aux normes imposées ; il y a des œuvres qui émergent, comme autant de manifestations d’inadaptation et / ou de résistance ; il y a des « miracles » qui poursuivent les traditions de la littérature pré-révolutionnaire, pendant les premières décennies soviétiques. Et puis, il y a LE « miracle littéraire » : un homme, né sous le régime soviétique, dénonce « l’ignominie » - les camps, mais aussi le mensonge et l’absence de liberté qui accompagnent et fondent l’oppression des populations.API standards  Et prendre la pleine mesure de ce qu’a été ce mensonge de la littérature officielle permet d’apprécier, aussi, ce miracle de la renaissance littéraire russe.
Il ne s’agit pas d’ergoter vainement sur un terme ou un autre. Mais tenir compte du contexte social et historique est indispensable pour penser la littérature russe soviétique et la définir. Peut-on, en effet, réduire cette littérature aux œuvres, jadis censurées, d’auteurs interdits, persécutés et martyrisés ? Que faire de la littérature officielle qui a été lue et inculquée en URSS pendant des décennies et a formé les spécialistes actuels ? Quelle littérature doit être enseignée dans les écoles et les universités ? Cette question – souvent réduite à « Pasternak ou Cholokhov ? » - n’est pas réglée en Russie.

 


1 SVIRSKI, Grigori. Écrivains de la liberté. La résistance littéraire en Union soviétique depuis la guerre. Paris : Éditions Gallimard, NRF, collection « Bibliothèque des idées », 1981. 496 p.

2 ETKIND, Efim. « Préface ». In : SVIRSKI, Grigori, op.cit., p.14.

3 SOLJÉNITSYNE, Alexandre. L’archipel du Goulag. Tome 2. Paris : Éditions du Seuil, 1974, p.470.

4 SVIRSKI, Grigori, op.cit., p.87.

5 « L’organisation du Parti et la littérature du Parti ». LÉNINE. Œuvres, tome 10. Paris : Éditions sociales. Moscou : Éditions du Progrès, 1975, p.37-43.

6 RGASPI (ex RCXIDNI) 17 / 3 / 881 / p.6, 22 ; 17 / 163 / 938 / p.37-38. Publié dans : ARTIZOV, Andrej. NAUMOV, Oleg (sostaviteli). Vlast’ i xudozestvennaja intelligencija. Moskva : Mezdunarodnyj Fond « Demokratija », collection : « Rossija. XX vek », 1999, p.172-173.

7 « Rec’ sekretarja CK VKP(b) A.A. Zdanova ». Pervyj vsesojuznyj s"ezd pisatelej. Moskva : « Xudozestvennaja literatura », 1934, p.2-5.

8 KUNDERA, Milan. L’Art du roman. Paris : Gallimard, collection NRF, 1986, p.29-30.

9 Et cela n’a rien à voir avec les corrections demandées par les éditeurs occidentaux, pour aussi exaspérantes que puissent parfois être celles-ci…

10 « R.S. Zemljacke ». FADEEV, Aleksandr. Sobranie socinenij. Tom sed’moj. Moskva : Izdatel’stvo « Xudozestvennaja literatura », 1971, p.39-42.

11 KAVERIN, Venjamin. Èpilog. Moskva : Moskovskij rabocij, 1989, p.313.

12 AP RF 45 / 1 / 201 / p.5. Publié dans : ARTIZOV, Andrej. NAUMOV, Oleg (sostaviteli), op. cit., p.150. Les mots soulignés le sont dans le texte originel.

13 Ibid, p.751.

14 CHENTALINSKI, Vitali. La parole ressuscitée. Paris : Robert Laffont, 1993, p.233-234.

15 RGASPI 17 / 125 / 366 / p.20-25.

16 SEMICASTNYJ, Vladimir. Bespokojnoe serdce. Moskva : Vagrius, 2002, p.51-52. FADEEV, Al. « « Èto mne bylo znakomo… » » Literaturnaja Gazeta, 5 novembre 1969, p.6.

17 « Molodaja Gvardija na scene nasix teatrov ». Kul’tura i Zizn’, 30 novembre 1947, p.4. « Molodaja Gvardija v romane i na scene ». Pravda, 3 décembre 1947, p.2-3. « Roman Molodaja Gvardija i ego inscenirovki ». Literaturnaja Gazeta, 7 décembre 1947, p.2.

18 Voir : ALLAIN-LUC, Annie. « La réécriture du texte : La Jeune Garde d’Alexandre Fadeev ». FOUGERON, Irina (Éd.). Études russes II. La Russie et le russe à travers les textes. Villeneuve d’Ascq : Université Lille 3 Charles de Gaulle, collection UL3 Travaux et Recherches, 1999, p.241-254.

19 BERGGOL’C, Ol’ga. « Blokadnyj dnevnik ». Aprel’, n°4, 1991, p.133.

20 CA FSB RF 2 / 9 / 518 / p.1-25. Publié dans : ARTIZOV, Andrej. NAUMOV, Oleg (sostaviteli), op. cit., p.160-163.

21 GLADKOV, Aleksandr. Vstreci s Pasternakom. Moskva : ART-FLEKS, 2002, p.109.

22 LIPKIN, Semen. Stalingrad Vasilija Grossmana. Ann Arbor : Ardis Publishers, 1986, p.33-34. OGNEV, Vladimir. Amnistija talantu. Moskva : Slovo, 2001, p.229.

23 Voir, notamment, « A.K. Tarasenkov ». TVARDOVSKIJ, Aleksandr. O literature. Moskva : « Sovremennik », 1973, p.238-240. BELKINA, Maria. Le destin tragique de Marina Tsvetaeva. Paris : Albin Michel, 1992, p.29-34, p.41, p.65-66. (Maria Belkina était la femme d’Anatoli Tarassenkov.) Entretien de l’auteur avec Alexandre Askoldov. Berlin, 31 mai 2002. OGNEV, Vladimir, op. cit., p.110.

24 LIPKIN, Semen. Zizn’ i sud’ba Vasilija Grossmana. BERZER, Anna. Prosanie. Moskva : « Kniga », 1990, p.73.

25 AP RF 3 / 34 / 269 / p.53-57. Publié dans : Federal’naja arxivnaja sluzba Rossii. RGANI. « A za mnoju sum pogoni… ». Moskva : ROSSPÈN, 2001, p.155-159. Voir aussi : « Edinodusnoe osuzdenie ». Literaturnaja Gazeta, 28 octobre 1958, p.3.

26 LIPKIN, Semen, BERZER, Anna, op. cit., p.73.

27ORLOVA, Raisa. « Istorija odnogo posleslovija ». SSSR : Vnutrennie protivorecija, n°13. New York : Chalidze Publications, 1985, p.122-144.

28 « Spusk pod vodu ». CUKOVSKAJA, Lidija. Izbrannoe. Moskva-Minsk : « Gorizont » i « Aurika », 1997, p.133.

29 Ibid, p.165.

30 Ibid, p.168.

31 LAHUSEN, Thomas. How life writes the book. Ithaca and London : Cornell University Press, 1997. 248 p. : index.

32 RGASPI 17 / 125 / 459 / p.20-23.

33 Vie et destin de Grossman est aussi, à sa façon, un « miracle littéraire », mais ce roman, terminé en 1960, n’a été publié, en URSS, que pendant la perestroïka.

34 GLOCER, V.I. CUKOVSKAJA, E.C. Slovo probivaet sebe dorogu. Moskva : Izdatel’stvo « Russkij Put’ », 1998, p.243-297. SOLJENICYN, Aleksandr. Sobranie socinenij. Tom sestoj. Frankfurt am Main : Possev Verlag, 1970, p.154-187.

35 SVIRSKI, Grigori, op.cit., p.219.

36 ETKIND, Efim. « Préface ». In : SVIRSKI, Grigori, op.cit., p.11.

37 GLOCER, V.I., CUKOVSKAJA, E.C., op. cit., p.211-216.

38 Voir : VAISSIÉ, Cécile. Les ingénieurs des âmes en chef. Littérature et politique en URSS (1944-1986). Paris : Belin, 2008, 521 p.

39 SVIRSKI, Grigori, op.cit., p.228.

40L.V. SERBA, M.I. MATUSEVIC. Russko-Francuzskij Slovar' - Dictionnaire Russe-Français. Moskva : Russkij Jazyk, 1988, p. 222.

41OZEGOV, S.I. Slovar' russkogo jazyka. Moskva : Russkij Jazyk, 1991, p.170.

42C'est également le point de vue exprimé dans : BOGORAZ, Larisa. DANIÈL', Aleksandr. « V poiskax nesusestvujusej nauki (Dissidentsvo kak istoriceskaja problema) ». Problemy vostocnoj Evropy, 1993, n°37-38, p.153.

43 SVIRSKI, Grigori, op.cit., p.23-24.

44 Novoe Russkoe slovo, 9 mai 1981, p.3.



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- Auteur : Cécile Vaissié, Université Rennes 2
- Titre : Normes, mensonges et miracles, dans la littérature russe soviétique
- Date de publication : 21-01-2012
- Publication : Revue Silène. Centre de recherches en littérature et poétique comparées de Paris Ouest-Nanterre-La Défense
- Adresse originale (URL) : http://www.revue-silene.comf/index.php?sp=comm&comm_id=100
- ISSN 2105-2816