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COLLOQUES


LES LETTRES FRANCOPHONES, HISPANOPHONES, LUSOPHONES ET LA LATINITE
Caramuru et la latinité amérindienne

Michel Riaudel - Université de Poitiers, CRLA-Archivos.


Nous avions en d’autres occasions confronté la latinité à des notions cousines ou concurrentes, comme les littératures du Midi, la romanité, voire certaines versions de l’idée de romantisme. En postulant des qualités, des traits identitaires d’ordre linguistiques et culturels, ces termes ont en commun de conjoindre des espaces, de construire une géographie qui se caractérise autant par les dénominateurs partagés que par les ensembles auxquels elles s’opposent : les mondes du Nord, l’aire anglo-saxonne, la communauté protestante…
Mais l’enjeu n’est pas seulement spatial, il est aussi historique. Il suppose une continuité qui relie le présent au passé, établit des héritages, renoue des fils en apparence rompus entre l’Antiquité et le contemporain. C’est précisément cet axe temporel qui non seulement détermine (ou légitime) synchroniquement les rapports de parenté et de filiation au sein des mondes proclamés latins, mais qui dans le même temps nous impose d’assumer la famille notionnelle déjà évoquée, romanité, romantisme, Midi…, dans ce qu’elle comporte de solidarités possibles et d’éventuels conflits internes.
Quoi qu’il en soit, la valeur téléologique du mythe latin, celle qui autorise alliances politiques et poétiques fondant un présent et un avenir collectifs, fédérant combats et revendications, différences et différends, ce destin latin est indissociable de la puissance étiologique de l’idée de latinité, qui amarre à Rome, Urbs impériale ou capitale de la Chrétienté, et du même coup relie Anciens et Modernes.
Or, comme l’a montré notamment François Hartog, le sauvage amérindien vient à partir de la Renaissance jeter le trouble sur les aménagements identitaires de l’Occident, les Grands Récits à propos de l’homme civilisé et de l’homme tout court. L’« Indien » va désormais, et pour longtemps, occuper le lieu de l’autre, porter sur ses épaules les tares et les vertus de l’étrangère humanité. On sait les conséquences tantôt tragiques, tantôt fécondes, qui découleront de cette surprenante découverte. Tenu en lisière de la culture, proche encore de la bête, ou du barbare, ou du dégénéré, ou dans le meilleur des cas de l’enfant, l’Indien va subir l’esclavage, la marche forcée vers la conversion, la « réduction », l’extermination, l’enclavement. Mais il est aussi le ferment de renversements critiques, de Montaigne à l’anthropologie américaniste, de Rousseau à Lévi-Strauss. Il fournit les armes conceptuelles qu’un Oswald de Andrade ou un Pierre Clastres, par exemple, vont retourner contre nos certitudes et nos conformismes, opposer aux ronronnements de l’ethnocentrisme et de la complaisance narcissique. Mort, aliéné, réservé ou rehaussé, cet Indien est celui de la disjonction, celui qu’un fossé sépare du colonisateur blanc.
Il existe cependant une lignée de discours sur l’indianité très éloignée de cette pensée de la rupture. On connaît les projections des premiers découvreurs, nommant avec leur outillage mental médiéval ce qu’ils voyaient ou imaginaient voir : « l’ancienne manière de guerroyer des Romains1 », de possibles vestiges du Paradis terrestre, la résurrection des Amazones… L’auteur d’Anciens, Modernes, Sauvages résume ainsi cette étape de reconnaissance, encore hantée par les références du passé, incompatible avec le relatif dénuement requis par une véritable démarche de connaissance : « […] le Nouveau Monde ne fut pas d’emblée appréhendé comme “nouveau”, mais plutôt comme un mélange de fantastique et de familier2. » Cette phase de quiproquos et d’équivoques, d’où est issue l’appellation même d’Indien tant Colomb était convaincu d’avoir pris le monde à revers, devait néanmoins rapidement se dissiper, les superpositions du sauvage et de l’antique prenant dès lors un caractère conscient et délibéré.
Une autre difficulté, plus épineuse, devait toutefois lui succéder, d’ordre empirique et théologique. Du point de vue du « morador », c’est-à-dire du colon — nous ne parlons là que du colon portugais —, il importait de se ménager autant que possible un séjour pacifié, avec un triple objectif : profiter des connaissances indigènes en matière de maîtrise des territoires, de la faune et de la flore, des pratiques alimentaires et curatives… ; concentrer ses forces dans l’agriculture et les activités extractivistes plutôt que d’avoir à soutenir des guerres interminables ; disposer d’une main-d’œuvre plus ou moins servile, indispensable à un royaume démographiquement déficient face aux terres à conquérir. Le colonisateur portugais a donc de l’Indien le plus souvent une vision pratique, ni diabolique, ni angélique. Ce qui ne l’empêche pas à l’occasion d’opposer tactiquement l’assimilable et l’irréductible : le féroce Tapuia contre le conciliable Tupi… Mais précisément parce que ces dichotomies sont pragmatiques, elles trouvent toujours une porte de sortie, un tour de passe-passe rhétorique pour les rendre tenables.
Les théologiens sont dans un plus grand embarras. Car comment admettre les Indiens dans le cercle de l’humanité sans du même coup considérer que Dieu a négligé, voire oublié une partie de sa création au moment de lui envoyer son fils ? Se serait-il fait homme pour ne rédimer qu’une partie du monde de l’état de péché originel et ne se révéler qu’à elle en toute lumière ? Telle est la question par laquelle le jésuite Simão de Vasconcellos ouvre un ouvrage paru en 1663 :

Les raisons de Dieu sont incompréhensibles : il y avait 6691 années que Son immense bonté et Son omnipotence infinie avaient tirées du néant cette machine terrestre […]. Et pourtant je ne sais en fonction de quel sort une partie de cette même terre lui advint en Sa grâce, plutôt qu’une autre, puisque celle qui de trois parties, l’Europe, l’Afrique et l’Asie, n’en forment qu’une, Dieu la choisit pour créer l’homme, former le Paradis (selon l’opinion la plus répandue), l’autoriser avec les Patriarches, à la tête des vivants doués de raison […]. Cependant l’autre partie de la terre, l’autre monde équivalent, non moins agréable, que le même Créateur avait déclaré très bonne, Il la laissa dans l’oubli, sans Paradis, sans Patriarches, sans Sa divine présence faite humaine ; sans la lumière de la Foi, et la salvation ; jusqu’à ce qu’après s’être écoulées 6691 années, il donnât l’ordre qu’apparaisse ce nouveau monde, recouvert, et ce fut elle3.

À sa suite, plus d’un siècle plus tard, en 1781 précisément, Paraguaçu, l’héroïne indienne du frère augustin Santa Rita Durão, à la strophe X du chant V de son poème épique Caramuru — que nous citons dans la traduction française d’Eugène de Monglave —, tire les conséquences morales d’un tel oubli :

[…] quelle faute peut-on raisonnablement reprocher à ceux qui ignorent tout ? Dieu prend-il par hasard moins de soin de nous que des autres hommes, et ne nous abandonne-t-il d’abord que pour nous condamner ensuite ? Sommes-nous d’une autre nature que vous, et était-il juste de nous cacher les vérités qu’on révèle au reste des humains ? Notre nation est-elle plus éloignée du ciel parce qu’entre elle et la vôtre se trouve le gouffre immense de l’Océan ?4

La fermeté de son promis, le Portugais Diogo Álvares, masque mal l’esquive argumentative qui sous-tend sa réponse :

Ne reprochez à personne, réplique le héros, une faute qui n’est que la vôtre, la vôtre seulement. Si, jetés sur cette terre, vous y cherchez avec soin le bien présent, pourquoi ne pas vous y occuper aussi de l’auteur de toutes choses ? Pour le reste vous avez un instinct, un esprit, une imagination ; ce n’est que lorsqu’il s’agit de Dieu que vous opposez à vos grossières fautes le bouclier de votre ignorance. Cette ignorance n’est point une excuse, mais un crime5.

Autrement dit, même privé des Saintes Écritures et de tous les signes envoyés dans l’Ancien Monde par Yahvé, l’Amérindien aurait dû d’instinct imaginer la Trinité, la transsubstantiation et l’immaculée Conception. La pirouette convainc si peu qu’elle impose aux chrétiens de la relayer par une série de subterfuges et de stratagèmes qui ont tous en commun de ménager des continuités entre les deux mondes.

Branche latine du monogénisme

La lecture littérale des Écritures conduit immanquablement à la thèse monogéniste : nous descendons tous d’Adam et de Noé. Encore faut-il expliquer comment une même « humanité » a pu se trouver répartie dans des continents si éloignés, séparés par un océan si longtemps infranchissable. Une première manœuvre cherche donc à faire venir ces populations des terres naguère connues. Simão de Vasconcellos, après avoir posé trois questions décisives à propos de ces Amérindiens : « de quelle partie du monde vinrent-ils ? À quelle nation appartenaient-ils ? Et de quelle manière se transportèrent-ils vers ces terres si éloignées ?6 », s’emploie méthodiquement à égrener une série d’hypothèses, au rang desquelles celle-ci :

D’aucuns ont dit que ces premiers habitants étaient de nation troyenne, et compagnons d’Énée ; car défaits par les Grecs dans la célèbre destruction de Troie, ils se séparèrent entre eux, en quête de nouvelles terres où habiter, comme des hommes mortifiés du monde, et le succès des armes. Certains disent qu’ils s’engouffrèrent sur le vaste Océan, et passèrent du côté de l’Amérique7.

Selon cette version, la souche indienne serait donc la même que celle des Romains, du moins dans sa version virgilienne. Cette explication, qui en vaut bien d’autres, reçoit la caution (interprétée comme telle) de sept vers de l’Énéide :

Lorsqu’il eut paru bon à Ceux d’En Haut, contre toute justice, de renverser l’empire d’Asie et la nation de Priam, et que la superbe Ilion fut tombée, et que tout ce qui avait été Troie bâtie par Neptune ne fut plus qu’un sol fumant, les signes que nous donnèrent les dieux nous poussèrent à chercher de lointains exils dans un monde désert8.

Mais l’acrobatique raisonnement n’a pas seulement à étayer une origine commune, il doit aussi s’évertuer à expliquer l’état d’abandon moral et religieux des Amérindiens, en dépit des affirmations du psaume, selon lequel la gloire de Dieu résonne jusqu’aux extrémités de la terre :

(2) Les cieux racontent la gloire de Dieu, et l’œuvre de ses mains, le firmament l’annonce ; (3) le jour au jour en publie le récit et la nuit à la nuit transmet la connaissance. (4) Non point récit, non point langage, nulle voix qu’on puisse entendre, (5) mais pour toute la terre en ressortent les lignes et les mots jusqu'aux limites du monde9.

Le tronc latin, comme les autres alternatives « migrationnistes », a l’avantage de ansi standards  faire d’une pierre deux coups, en suggérant une arborescence dont les branches visées ont en commun l’innocence, le paganisme ou la barbarie. Il s’accorde avec le procédé comparatiste rapprochant les peuples antiques de la sauvagerie américaine. Prolongeant la pratique fort ancienne des raisonnements par analogie, la comparaison ne cherchait pas nécessairement à dessiner des généalogies rigoureuses. Elle convenait aussi bien pour comprendre les uns par les autres, justifier un état d’ignorance ou faire revivre une sorte d’âge d’or commun. Déjà des cosmographes comme Alessandro Alessandri10 ou André Thevet11 juxtaposaient tout ce que la terre avait porté de monstres et barbares, des origines à l’ère post-colombienne. On se souvient des vers « anacréontiques » que Montaigne attribuait à ses cannibales, dans un chapitre (et un ouvrage) qui allait et venait fréquemment entre les temps anciens et son siècle, voire le Nouveau Monde. José de Acosta, dans l’Historia natural y moral de las Indias publiée à Séville en 1590, comparait les sacrifices des Incas à ceux des anciens Hébreux.

Rameaux dégénérés

Ce comparatisme va néanmoins progressivement systématiser la quête de liens de causalité ou d’engendrement entre mondes éloignés. Les interprètes chrétiens associent alors la thèse monogéniste au constat d’une dégénérescence des mœurs et des croyances : la distance spatiale ou temporelle a fait oublier l’authentique parole divine, la mémoire des préceptes et commandements s’efface. En France, Pierre-Daniel Huet s’appuie justement sur les témoignages de Francisco López de Gómara, José de Acosta et Inca Garcilaso de la Vega pour faire converger le nom d’une divinité mexicaine, Teutl, avec le Theuth égyptien. Et les rites sacrificiels humains des peuples antiques de la Méditerranée, Carthaginois et autres, avec ceux des Indes occidentales. Ce qui justifie l’hypothèse d’une migration partie de l’Europe ou de l’Afrique, éventuellement sub-équatoriale12. Deux ans plus tard, Bossuet lui emboîte le pas dans son Discours sur l’histoire universelle13. En 1704, M. de La Créquinière cherche à démontrer la Conformité des coutumes des Indiens Orientaux, avec des Juifs et des autres Peuples de l’Antiquité. Après avoir constaté l’écart irréductible entre la théologie hindoue et celle des Anciens Païens, il poursuit dans son liminaire :

Je n’ai pas jugé la même chose de leurs Coûtumes particulieres, que j’ai regardé comme de precieux restes de l’Antiquité, qui pouvoient servir à éclaircir plusieurs endroits des Autheurs anciens, & particulierement de l’Ecriture Sainte […]14.

Même s’il n’avoue pas cette dette et quoique certaines lectures contemporaines le créditent d’une rigueur nouvelle au point de faire de lui le père de l’ethnographie moderne, le missionnaire jésuite Joseph François Lafitau transpose la méthode de La Créquinière à l’Amérique septentrionale, dans son étude sur les Mœurs des sauvages ameriquains comparées aux mœurs des premiers temps15. Avec toujours la même obsession : faire une place au Nouveau Monde dans l’oublieuse universalité de la parole divine.
Partiellement en continuité avec cette opinion, l’épopée luso-brésilienne de Santa Rita Durão, qui s’inspire autant de l’Énéide (dont elle emprunte certains éléments narratifs), que des Lusiades de Camões pour ce qui est de la matrice formelle, revient à l’assimilation entre la sauvagerie des Indiens et celle de Rome ou de Carthage.

Quelle horreur [de] l’humanité ! voir dévorer ainsi la chair déjà corrompue de ses semblables ! Ah ! combien l’Europe fortunée ne doit-elle pas à ce divin Rédempteur, dont elle accueille humblement les préceptes ! Les pauvres Américains ne se livrèrent pas seuls à cette horrible pratique ; elle fut en usage à Rome, à Carthage, et plus d’une fois des victimes humaines ensanglantèrent les autels de Saturne16.

La nuance consiste à distinguer les sacrifices humains et l’anthropophagie, que le poète rapproche, dans une note à cette strophe, du cannibalisme des peuples antiques :

Les anciens Italiens furent, comme on le tient d’Homère, des anthropophages ; tels étaient les Lestryngons et les insulaires de Lipari. Les Phéniciens et les Carthaginois eurent recours à des victimes humaines, et Rome elle-même en ses moments les plus difficiles. Ce sont des espèces courantes dans l’Histoire17.

Idée que vient compléter la note de la strophe 30 du même chant :

Il est vrai que les Brésiliens n’avaient à proprement parler pas de sacrifice ; mais la fonction solennelle et les rites, par lesquels ils tuaient leurs prisonniers, semblent avec raison au père Simão de Vasconcellos dans son Histoire du Brésil, un vestige des anciens sacrifices pratiqués par les Phéniciens dont nous avons parlé plus haut dans une autre note18.

Santa Rita Durão venait à nouveau, dans la strophe précédente, de s’employer à attester le rapprochement, se valant de la tradition mythologique qui attribue à Saturne — pour donner le change à son frère Titan dont c’était la condition pour lui céder le pouvoir — l’intention simulée (ou l’acte, selon d’autres versions) de manger ses enfants :

La barbarie de l’Antiquité allait, croit-on, dévorer les nouveaux-nés eux-mêmes ; ce depuis que cette cruelle voracité avait été au vieux Saturne attribuée : feinte finalement, ainsi fut cependant inventé le diabolique homicide, de ce que les uns ici se tuent, les autres là-bas se mangent […]19.

Rédimer une seconde fois la latinité barbare

Sans y faire explicitement référence, le poète théologien reprend ainsi l’affirmation de Giambattista Vico, dans La Science nouvelle : « Plaute nous dit que les Latins appelèrent toujours de semblables sacrifices par le nom de Saturni hostiæ […]20. » Mieux, il étend à l’Amérique le système cyclique, mis en place par le philologue napolitain, d’une « histoire idéale éternelle » selon laquelle « toutes les nations march[e]nt d’un pas uniforme dans leur naissance, leurs progrès, leurs établissemens, leur décadence et leur chute21. »
La latinité qui sert ici de point de repère à la compréhension de l’amérindianité peut sembler aux antipodes de celle que réinvente le XIXe siècle comme une sorte d’idéal-du-nous à vocation impériale ou supranationale. Elle a partie liée avec la « barbarie ». Toutefois le regard de Vico comme celui de Santa Rita Durão, bien que distincts à divers égards, ont en commun l’ambivalence. Le projet de La Science nouvelle n’est-il pas de réhabiliter chaque station du développement historique de l’humanité en tant qu’étape du dessein secret de la Providence ? Il y aurait un savoir caché dans l’ignorance des peuples païens, des « sources véridiques » dans les « traditions qui nous sont parvenues enveloppées de mensonge et de fausseté, à travers tant de siècles et tant de changements de mœurs et de langages22. »
On décèle de même dans le poème luso-brésilien à la fois la condamnation effrayée des rituels indigènes et une bienveillance récompensée par la prédisposition, la conversion ou la reddition de plus d’un sauvage aux discours, prêches et actes de bravoure de Diogo Álvares « Caramuru », revêtu des habits du colonisateur-missionnaire. La parenté des Indiens avec la tradition latine la plus rustre et reculée23 ne repose pas ici sur une identité essentialiste, ni donnée immuable ni fin en soi, mais fournit le terreau permettant l’accès à un stade supérieur de civilisation. Tant et si bien que la conclusion du poème met en scène la vassalisation du Brésil, prononcée par celle qui en était la « princesse », Paraguaçu, à l’adresse de son peuple :

Brésil encore sauvage, ô ma chère patrie ! le ciel promet cette auguste race à tes fidèles descendants. Soumets-toi donc sans murmurer au joug paternel de ces bons rois, et cours verser tes trésors dans leur sein. Parmi les nombreuses nations que le Portugal rallie à l’ombre de ses glorieux lauriers, seule tu n’éprouveras point les horreurs de la guerre, et tu viendras de toi-même te livrer à des chaînes de fleurs24.

La cérémonie d’allégeance est supposée se dérouler en présence du premier gouverneur général du Brésil, au moment même de son arrivée à Bahia en 1549, délégué par la couronne portugaise pour instaurer les prémices d’une administration ultramarine. Devant lui, Paraguaçu, installée sur « le trône qui lui a été préparé », est dotée des équivalents primitifs des attributs de l’autorité monarchique : « De brillantes plumes, emblème reconnu de l’empire brésilien, environnent son front ingénu et son bras terrible ; pour sceptre sa main lève le foudroyant marraque sur lequel la foule fixe un œil respectueux25. »

Latinité amérindienne et « génie de l’indianisme »

Curieusement, l’insistance de Santa Rita Durão à consolider par un appareil didactique la quête poétique d’un fondement commun, en l’occurrence latin, à la chrétienté et à la sauvagerie des « gentils brésiliens », est comme nous l’avons souligné totalement négligée par l’adaptation française, qui ignore les notes26 et la strophe 29 du premier chant. Outre que Monglave cherche à réformer en roman héroïque ce qui était un poème épique, il n’est plus sensible à des débats d’une autre époque. En moins d’un demi-siècle, la page du monogénisme « testamentaire » a été tournée par l’Église qui a désormais d’autres préoccupations que de défendre la lettre des Écritures, ébranlée qu’elle est par les Lumières et leurs traductions révolutionnaires. Si monogénistes et polygénistes continuent de s’affronter, c’est sur des terrains moins théologiques que prétendument « rationnels » ou « scientifiques ». Avec cette mutation, la question d’un continuum entre Européens et Amérindiens voit ses enjeux s’inverser, sur fond de recul ou d’effacement physique des seconds : le romantisme, à travers sa version indianiste, déplore la dispersion des Natchez et derniers Mohicans, idéalisant la sagesse ancestrale de ces nobles guerriers. Autrefois soucieux de sauver le Gentil, l’âme mécréante, le « génie du christianisme » se trouve maintenant des affinités avec la « bonne sauvagerie », un paganisme magnifié dont l’épopée chrétienne peut néanmoins seule constituer le dépassement.

Mère des actions sublimes ! toi qui, depuis que la Grèce n’est plus, as établi ta demeure sur les tombeaux indiens, dans les solitudes du Nouveau-Monde !

Ainsi Chateaubriand invoque-t-il, au livre 12 des Natchez, la fibre épique qui réconcilie Antiquité et Temps Modernes.
Santa Rita Durão, lui, prétendait à travers son Caramuru exalter la gloire du Portugal chrétien né de la Reconquista : « Les succès du Brésil ne méritaient pas moins un poème que ceux de l’Inde. C’est l’amour de la patrie qui me poussa à écrire celui-là27. » La patrie dont il est ici question, ne nous méprenons pas, désigne l’empire luso-brésilien, chanté trois siècles auparavant dans son déploiement oriental par les Lusiades, et non le seul Brésil. En outre l’amour de la patrie comporte une part de pénitence : redevenu professeur de théologie à l’Université de Coimbra à la fin des années 1770, l’ermite des Grands Augustins ne savait comment se racheter auprès de la très catholique Maria I — régnant depuis 1777 — d’avoir servi en 1759 les projets impies de Sebastião José de Carvalho e Melo, le futur marquis de Pombal, débouchant sur l’expulsion des jésuites de l’empire portugais. C’est dire, d’une certaine manière, que l’œuvre de 1781 était tournée vers le passé, et pour ainsi dire anachronique, tant dans ses modèles poétiques que dans sa vision dogmatique. Ce qui n’empêcha pas Ferdinand Denis et son entourage, par d’autres anachronismes et biais de lecture, d’opérer une mutation du poème épique en de nouveaux avatars, relayés à leur tour par l’intérêt de l’Empire brésilien de dom Pedro II, les uns et les autres assurant ainsi à ce texte une survie qui devait se prolonger bon an mal an jusqu’à nos jours.
Ce qui y demeure pourtant en partie illisible — et que nous avons tenté de remettre à jour —, tant la veine indianiste puis les ruptures de l’anthropologie contemporaine d’une part, et les fortunes diverses du mythe latin de l’autre, l’ont recouvert de voiles épais, c’est l’effort de trois siècles chrétiens pour romaniser ou latiniser le Nouveau Monde, pas simplement par l’évangélisation mais aussi par l’invention d’un passé partagé. Simão de Vasconcellos ou Santa Rita Durão ne sont que quelques maillons illustrant ce discours du continuum allant de la barbarie à la civilisation et réciproquement, unifiant Europe et Amérique. Dans Visão do Paraíso, à propos de la construction du mythe luso-brésilien de saint Thomas28, l’historien Sérgio Buarque de Holanda avait d’ailleurs souligné comment cette thèse allait servir à légitimer, au Brésil, l’asservissement dont seraient victimes Indiens et Africains :

[…] tandis que l’Église se voyait contrainte à une ample révision de ses anciennes positions, cherchant à renouveler sa structure idéologique elle-même en accord avec l’image du monde qui commençait pour la première fois à se redessiner, la simple tentative d’identification d’un héros mythique ancestral des Indiens du Brésil avec l’apôtre des Indes devait réduire les doutes en fournissant une solution concrète et « historique » au problème. La solution coïncidait d’ailleurs avec les thèses auxquelles demeuraient fidèles bien des plus illustres théologiens de la Contre-Réforme, tel Belarmino, encore attachés à l’idée de la prédication universelle des apôtres, qui serait parvenue jusqu’aux très lointaines îles de la Mer Océan où, après que son souvenir s’en fut perdu, elle était désormais en passe d’être revivifiée par de nouveaux apôtres. […] une fois admise la prédication universelle de l’Évangile, les possibilités de guerre juste contre certains peuples primitifs tendront du même coup à s’élargir, dans la mesure où ces sauvages pouvaient ne plus être maintenant assimilés à des gentils, ignorants de la vérité révélée, mais aux apostats29.

Hors territoire

Tentons en guise de conclusion une échappée plus joyeuse, prenant appui sur ces constructions latinisantes du sauvage pour les retourner contre elles-mêmes. À contre-courant de ce que prétendront être les espaces de la latinité à partir du XIXe siècle — si l’on excepte ce qu’en fait Nietzsche, lorsqu’il revendique par exemple la concision aristocratique du « style romain30 » —, la « Latino-amérindianité » pourrait en effet, dépouillée de ses arrière-pensées théologiques, se prêter à un nouveau renversement par ce qu’elle suggère de virtualité déterritorialisante ou plutôt de « territorialité itinérante31 ». L’Anti-Œdipe réinterprétait le fait colonial comme une perpétuation de l’Œdipe et la réplique du colonisé comme résistance à l’« œdipianisation32 ». C’était ici penser à l’Œdipe de la « phase impériale, despotique, paranoïaque », dont le contrepoint serait l’Œdipe de l’errance et de la ligne de fuite33. Et si l’on jouait le cheminement vers Colone contre Thèbes, le nomadisme américain contre la sédentarité identitaire ? Dérivée de ses différences barbares, la latinité déromanisée pourrait alors s’entendre à son tour ironiquement non plus comme ancrage essentialiste, mais comme dispositif possible de devenir mineur.

1 André Thevet, Les Singularités de la France Antarctique, chap. XVI, cité par François Hartog, Anciens, Modernes, Sauvages, Paris : Galaade éditions, coll. « Points-Seuil », 2005, p. 45.

2 F. Hartog, ibid., p. 43.

3Simão de Vasconcellos,Chronica da Companhia de Jesu do Estado do Brasil e do que obraram seus filhos n’esta parte do Novo Mundo. Em que se trata da entrada da Companhia de Jesu nas Partes do Brasil, dos Fundamentos que n’ellas lançaram e continuaram seus religiosos, e algumas notícias antecedentes, curiosas e necessárias das cousas daquele Estado,Lisbonne : A.J. Fernandes Lopes, 1865 [1ère éd. 1663], p.6. Nous traduisons.

4 José de Santa Rita Durão, Caramurú, ou La Découverte de Bahia, trad. Eugène de Monglave, Paris : Eugène Renduel, 1829, tome II, p. 68-69. Voici la version originale :
Embora seja assim; (disse a donzella);
Mas que culpa tem estes, que o ignoravão?
Não cuida acaso Deos, ou pouco zela
As almas, que entre nós se condenavão?
E senão, por que causa aos mais revela
As doutrinas, que aos nossos se ocultavão?
Distava mais do ceo a nossa gente,
Porque medea o mar d’Este a Poente?

Fr. José de Santa Rita Durão, Caramurú. Poema épico do descobrimento da Bahia, Lisboa: Régio Officina Typografica, 1781, chant V, strophe X, p. 144.

5 Op. cit., p. 69. Et la version de Santa Rita Durão, op. cit., p. 144.
Tornai a culpa a vós; e a vós sómente
(o Heróe responde assim) Se com estudo
Procurais sobre a Terra o bem presente,
Porque não procurais o Author de tudo?
Para o mais tendes lume, instincto e mente;
Sómente contra Deos buscais o escudo
Em a vossa ignorancia á brutal culpa!
Essa ignorancia he crime, e não desculpa.

6Simão de Vasconcellos,op. cit., p.36.

7Ibid., p. 41.

8 Virgile, L’Énéide, trad. André Bellessort, Paris : Les Belles Lettres, 1974, Livre III, v. 1-6, p. 68.

9 Traduction de La Bible de Jérusalem (BJ). Il s’agit pour cette version du psaume 19 (2-5), ou du psaume 18 dans d’autres versions. De ces versets se feront écho les Actes des apôtres : « Mais vous allez recevoir une force, celle de l’Esprit Saint qui descendra sur vous. Vous serez alors mes témoins à Jérusalem, dans toute la Judée et la Samarie, et jusqu’aux extrémités de la terre. » (Actes 1, 8, BJ). Et saint Paul : « Or je demande : n’auraient-ils pas entendu ? Et pourtant leur voix a retenti par toute la terre et leurs paroles jusqu’aux extrémités du monde. » (Épître aux Romains, X, 18, BJ).

10 Alessandro Alessandri, Genialium dierum libri sex, varia ac recondita eruditione referti, Rome, 1522.

11 André Thevet, Le Brésil d'André Thevet. Les Singularités de la France Antarctique (1557), édition intégrale établie, présentée et annotée par F. Lestringant, Paris : Chandeigne, 1997. Et surtout sa Cosmographie universelle, Paris : Pierre L’Huiller et Guillaume Chaudière, 1575.

12 Pierre-Daniel Huet, Demonstratio evangelica, Paris : Estienne Michallet, 1679, p. 109-111.

13 Discours sur l’histoire universelle à Monseigneur le Dauphin pour expliquer la suite de la Religion & les changements des Empires depuis le commencement du monde jusqu’à l’Empire de Charlemagne, Paris : S. Mabre-Cramoisy, 1681.

14 M. de La Créquinière cherche à démontrer la Conformité des coutumes des Indiens Orientaux, avec des Juifs et des autres Peuples de l’Antiquité, Bruxelles : George de Backer, 1704, « Idée générale de l’ouvrage » non paginée [p. *2*].

15 Joseph François Lafitau, Mœurs des sauvages ameriquains comparées aux mœurs des premiers temps, Paris : Saugrain et Charles Estienne Hochereau, 1724, 2 vol. Voltaire résumera cruellement la démonstration : « Enfin Lafitau fait venir les Américains des anciens Grecs ; et voici ses raisons. Les Grecs avaient des fables, quelques Américains en ont aussi. Les premiers Grecs allaient à la chasse, les Américains y vont. Les premiers Grecs avaient des oracles, les Américains ont des sorciers. On dansait dans les fêtes de la Grèce, on danse en Amérique. Il faut avouer que ces raisons sont convaincantes. », Essai sur les mœurs et l'esprit des nations et sur les principaux faits de l'histoire, depuis Charlemagne jusqu'à Louis XIII, 1756, Introduction, chap. 8, « De l’Amérique ».

16 Trad. E. de Monglave, op. cit., t. I, p. 49-50. À partir de Santa Rita Durão, op. cit., chant I, strophe 18, p. 15.
Que horror da Humanidade! ver tragada
Da propria especie a carne já corrupta!
Quando não deve a Europa abençoada
A Fé do Redemptor, que humilde escuta?
Não era aquella infamia praticada
Só dessa gente miseranda, e bruta;
Roma, e Carthago o sabe no nocturno
Horrivel sacrificio de Saturno.

17 « Os antigos italianos forão, como se collige de Homero, Antropofagos; tais erão os Lestrigões, e os Liparitanos. Os Fenicios e os Carthaginezes usarão de Victimas humanas, e Roma propria nos seus maiores apertos. São especies vulgares na Historia. »,op. cit., p. 40. Nous nous substituons pour la traduction à E. de Monglave, qui a délaissé les notes originales.

18« He certo que os Brazilienses não tinhão fórma alguma expressa de Sacrificio; mas a solemne função, e ritos, com que matavão os seus prisioneiros, parece com razão ao Padre Simão de Vasconcellos na sua Historia do Brazil, que erão um vestigio dos antigos Sacrificios usados dos Fenicios, de que assima fallámos em outra Nota. »,op. cit., p. 40. Nous traduisons.

19 « Barbarie foi (se crê) da antiga idade
A propria prole devorar nascida;
Desde que essa cruel voracidade
Fora ao velho Saturno atribuída:
Fingimento por fim, mas he em verdade,
Invenção do diabolico homicida,
Que huns cá se matão, e outros lá se comem […]. »

Ibid., p. 18. Nous traduisons.

20 Giambattista Vico, La Science nouvelle, trad. Christina Trivulzio, princesse de Belgiojoso, Paris : Gallimard, coll. « Tel », 1993 [1725], p. 80.

21 Ibid., p. 89.

22 Ibid., p. 72.

23 En dépit de l’inspiration épique de Santa Rita Durão, puisant non seulement, comme nous l’avons vu, chez Virgile et Camões, mais aussi dans la veine italienne illustrée par l’Arioste et Le Tasse, le frère augustin cède rarement à la fioriture mythologisante. Toutefois il consent à attribuer la tempête qui provoque le naufrage de Diogo Álvares et de ses compagnons, à la strophe 10 du chant I de l’épopée, à l’action conjuguée de Neptune et de Jupiter (ce dont ne rend une nouvelle fois pas compte l’adaptation française). Comme si les éléments hostiles à cet équipage chrétien pouvaient laisser place à l’invocation d’esprits régnant sur la part superstitieuse du monde. Plus qu’un poncif de l’épopée, on peut y lire la réaffirmation de cette analogie entre le monde amérindien et l’antiquité païenne.

24 Caramurú…, trad. E. de Monglave, op. cit., t. III, p. 146. Cf. Santa Rita Durão, op. cit., chant X, strophe LVIII, p. 303.
Esta insigne Progenie o céu promete,
Brasil agora rude, aos teus vindouros,
O cóllo humilde em tanto ao Rei sobmette,
E offerece-lhe contente os teus thesouros:
E entre tantas nações, que ao jugo mette
À sombra Portugal dos verdes louros,
Sem provares da guerra o furor vario,
Chega ao Throno a humilhar-te voluntario.

La confrontation entre la strophe originale et sa version française fait apparaître de significatifs glissements sémantiques introduits par E. de Monglave : l’insertion du terme « patrie », l’atténuation de l’image du « joug », qualifié de paternel et exercé par un bon roi, l’effacement de l’idée d’humiliation volontaire remplacée par des « chaînes de fleurs ». Ces déplacements s’expliquent par un double changement de contexte : la proclamation de l’indépendance brésilienne en 1822, et, plus généralement, l’émergence des États nationaux, tant européens qu’américains. De sorte que le poème, par lequel Santa Rita Durão arrimait le territoire brésilien à l’empire portugais en en faisant l’un de ses plus beaux fleurons, est lu près d’un demi-siècle plus tard comme la préfiguration de l’expression d’une conscience nationale.

25 Caramurú…, trad. E. de Monglave, op. cit., t. III, p. 140. Cf. la version de Santa Rita Durão, op. cit., chant X, strophe LVIII, p. 300.
[…] Catharina […]
O throno occupa, e as attenções convida:
Tinha emplumada a fronte, e o forte braço,
Como insignia de Imperio conhecida,
Hum marraque por sceptro sustentava,
Que toda a turba com respeito olhava.

On relèvera l’ornement plumaire qu’E. de Monglave ajoute au bras de Paraguaçu, au bout duquel ne se dresse, dans l’original, que le sceptre impérial. Supplément pittoresque très romantique.

26 E. de Monglave les remplace en fait à la fin du dernier volume par ses propres annotations qui viennent, pour le lecteur français, compléter de précisions naturalistes et ethnographiques exotiques les informations fournies sur le Brésil par le texte de Santa Rita Durão.

27 « Os successos do Brazil não merecião menos hum Poema, que os da Índia. Incitou-me a escrever este o amor da Patria. » Telles sont les deux premières phrases des « Réflexions préliminaires et arguments » qui servent de préface à son épopée, op. cit., p. I.

28 L’apôtre, non content d’aller prêcher dans les Indes orientales et d’y connaître le martyre, aurait aussi été aperçu par les Tupi et autres nations d’Amérique du Sud. Les missionnaires s’appuyaient entre autres arguments, sur la correspondance entre une supposée divinité tupi et le saint. Voir à ce sujet le chapitre V, « Um mito luso-brasileiro », de l’œuvre de Sérgio Buarque de Holanda : Visão do paraíso : os motivos edênicos no descobrimento e colonização do Brasil, São Paulo : Ed. Nacional, coll. « Brasiliana », n° 333, 1985, 4e éd. [1ère éd. : 1959], p. 104-125.

29 « […] enquanto a Igreja se via impelida a uma ampla revisão de suas antigas posições, buscando renovar a própria estrutura ideológica de acordo com a imagem do mundo que se começava pela primeira vez a descortinar, a simples tentativa de identificação de um herói mítico ancestral dos índios do Brasil com o apostolo das Índias, deveria simplificar as dúvidas, fornecendo uma solução concreta e “histórica” para o problema. Solução coincidente, aliás, com as teses a que permaneciam fiéis muitos dos mais ilustres teólogos da Contra-Reforma, como Belarmino, ainda aferrados à idéia da universal pregação dos apóstolos, que teria chegado às remotíssimas ilhas do Mar Oceano onde, perdida mais tarde a lembrança delas, ia sendo reavivada agora pelos novos apóstolos. […] uma vez admitida a pregação universal do Evangelho, tenderiam por força a alargar-se as possibilidades de guerra justa contra alguns povos primitivos, equiparados, agora, não a simples gentios, ignorantes da verdade revelada, mas aos apóstatas. », Visão do paraíso, op. cit., p. 124-125.

30 Cf., entre autres, le § 1 de « Ce que je dois aux Anciens », in Friedrich Nietzsche, Le Crépuscule des idoles, trad. Jean-Claude Hémery, Paris : Gallimard, 1974, p. 146-147.

31 Gilles Deleuze et Félix Guattari, Capitalisme et schizophrénie II. Mille Plateaux, Paris ; éd. de Minuit, 1980, p. 255.

32 Cf. Gilles Deleuze et Félix Guattari, Capitalisme et schizophrénie I, Paris ; éd. de Minuit, 1972-1973, p. 163-324 (« Sauvages, barbares, civilisés »), et en particulier p. 199-200.

33 Cf. Mille Plateaux, op. cit., p. 156.


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- Auteur : Michel Riaudel - Université de Poitiers, CRLA-Archivos.
- Titre : Caramuru et la latinité amérindienne
- Date de publication : 14-09-2011
- Publication : Revue Silène. Centre de recherches en littérature et poétique comparées de Paris Ouest-Nanterre-La Défense
- Adresse originale (URL) : http://www.revue-silene.comf/index.php?sp=comm&comm_id=80
- ISSN 2105-2816